Lanterne Magique Cherche Idées Lumineuses

Par admin • 6 Nov, 2009 • Catégorie: Cinéma

Sans connaissance en optique, projeter sur un mur une image de verre animée relève de la gageure. Encore faut-il, avant même d’y arriver techniquement, avoir l’idée d’une projection animée… Hommage à Christiaan Huygens, très probable inventeur de la lanterne magique.

« Tout le cinéma dans son intégralité vient des premiers magiciens et des spectacles de la lanterne magique » a écrit F. Coppola, « émerveillé depuis l’enfance par les instruments scientifiques et les appareils d’optique ». C’est en 1659, dans les manuscrits de Christiaan Huygens, que semble être apparue pour la première fois la conception de projections animées « à la lampe ». Il s’agit de dessins prototypes pour des plaques de verre indépendantes. L’un deux représente une « Danse de mort », un squelette qui joue avec sa tête en la lançant en l’air.

A partir de 1665, des livres rapportent son existence et la lanterne se répand très vite, allant même jusqu’en Chine… Initialement intitulée « lanterne de la peur », par Huygens, elle devient rapidement « magique », au vu de la variation des thèmes qu’elle anime et fait vivre. La projection s’effectue à l’aide de deux plaques de verre. La première, qui reste fixe, comporte les éléments de la figure qui ne changent pas dans le mouvement. Imaginons une cage… La seconde plaque se trouve articulée à la précédente, intégrant ainsi un élément qui se déplace. Un oiseau qui sort et rentre dans la cage, par exemple.

C’est la combinaison unique de trois lentilles optiques qui permet, à l’époque, de projeter les deux représentations en les grossissant. Les doubles plaques imposent en effet un défi technique, étant donné que le dessin ne peut être inscrit sur une lentille convexe. Hors, il est très difficile de projeter nettement deux dessins fixés sur des plaques indépendantes, donc en contiguité dans l’espace. La combinaison des lentilles relève ici d’une habilité conceptuelle catégorique.
À en juger par la correspondance de l’époque, seul Huygens la connaît. Mais pour ce rigoureux scientifique, l’appareil tient de la curiosité, au même titre que les marionnettes, les chambres noires et l’anamorphose. Il n’imagine pas les défis scientifiques que feront émerger les lanternes, à travers, par exemple, la projection lumineuse des heures. Il n’anticipe pas le rôle que tiendront les lanternes dans la vulgarisation de la science, ou du moins néglige-t-il la nécessité de cette propagande. Ainsi se refuse-t-il à délivrer le « secret de la lanterne » et ment-il à son père, qui souhaite la présenter devant la cour, en lui affirmant qu’il a oublié les références de l’une des lentilles. Une lettre datée de 1662 montre pourtant qu’il en vendit un exemplaire en France.

Pour autant, il faut se garder d’attribuer l’invention de la lanterne animée à Huygens. D’une part, le concept de succession dynamique avait été développé avant lui, à travers d’autres procédés techniques. D’autre part, rien ne prouve que Huygens est le réel inventeur de cette combinaison. Cependant, tout porte à le croire. Astronome, théoricien reconnu, et grand observateur, Huygens est également bon technicien. Il rédige d’un côté des traités sur la lumière et la dioptrique, et invente de l’autre l’horloge à pendule. Passionné d’optique, il effectue des travaux sur la taille et le polissage des lentilles, qui lui servent à fabriquer des télescopes et des lunettes. La découverte de Titan, satellite de Saturne, lui valut d’ailleurs une renommée internationale. Alors, peut-être que Huygens a eu l’idée titanesque d’articuler la théorie de la dioptrie et la technique de l’animation en un seul objet. Et le génie, surtout, d’avoir réussi à percer l’énigme de la combinaison. Mais le voile de l’histoire recouvre le passé.

Henri Jautrou

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